Pas de répit pour l'asso pendant la période estivale
Mon voyage au Cambodge a été l'occasion d'aller à la rencontre de l'école de Trapaing Anhchang (un jour, c'est promis je saurais l'écrire correctement !!), de son directeur et des enfants...
En accord avec l'ensemble du CA et du directeur de l'école, j'avais pour mission d'apporter une trousse de 1ers secours pour les enfants, et d'étudier un peu ce qui était existant en terme de soins et d'hygiène pour voir à les améliorer lors d'un prochain passage.
Je vous livre ici le fruit de ma visite, mes réflexions et quelques images...
C'est parti !
Mercredi matin, j’ai donné rendez-vous à Nato, mon chauffeur pour la journée à 7 heures, je prévois large pour me rendre à l’école, mon sens de l’orientation et moi-même savons déjà qu’il ne va pas être simple de rejoindre Théa et les petits bouts !
Nato ne sait pas où se trouve le village, et après avoir fait le tour de Phnom Penh pour trouver, en vain, un plan de la région, je finis par lui proposer de prendre la route de l’aéroport et d’appeler Théa en chemin pour une séance de radio guidage en direct !
Nous nous arrêtons à la pharmacie de la gare, je sais que les employés y parlent français, ça va me faciliter la tâche ! A la demande de Théa, l’asso a décidé d’équiper l’école d’une trousse de 1ers secours.
J’essaye de faire en sorte avec l'aide du pharmacien que les dates de péremption soient le plus éloignées possibles.
Ils n'ont pas d'antiseptique en spray (ça évite une péremption trop rapide), j'opte donc pour des doses individuelles, il y en a 40.
Du coton (2 gros sachets), des compresses (80), des pansements (200) et 2 bobines de sparadraps.
Hemoclar (2 tubes) pour les bleus, et j'ai bien explique a Thea dans quel cas l'utiliser (sur les coups ou les bleus mais surtout pas sur une plaie). Il le notera en khmer sur les boites.
Du paracétamol (100 comprimes de 500mg, sécable en deux pour les petits), avec notice en khmer (que les instits utilisent déjà en fait, j'y reviendrai).
Du petit matériel (pince pour enlever les échardes et petite paire de ciseaux)
Des gants stériles (10 paires)
Une trousse pour ranger tout ça, pas de trousse en métal, mais rigide et dotée de fermeture éclair.
Elle n'est de toute façon pas stockée dans la classe.
Sur la route, j’explique à Nato que je souhaite m’arrêter pour acheter des fruits pour les enfants, il m’arrête sur un petit marché hors de Phnom Penh, les denrées y sont moins chères me dit-il.
Je prends 6 kg de fruits : ramboutans, fruits du dragon, et plein d’autres dont j’ai déjà oublié les noms. Je goûte tout ce que j’achète, je veux éviter de leur ramener des fruits trop amères ou acides.
Nous venons de passer l’aéroport. Je sais que nous devons prendre la route de Sihanoukville, mais Nato préfère que nous appelions Théa avant d’avancer plus loin.
Théa est adorable et ravi de mon passage, et c’est avec plaisir qu’il explique en khmer à Nato comment arriver jusqu’à lui.
Ce village est un peu perdu au milieu de nulle part, je prends soudain conscience des difficultés des familles. Comme très souvent dans ce pays, les habitations sont très sommaires, certaines sont juste faites de tôles, de bâches…
Je comprends maintenant pourquoi les membres du CA de l’asso insistent sur la nécessité de faire suivre les gamins par un médecin. Ce ne serait sûrement pas du luxe !
Ca y est, le voilà, Théa m’accueille telle une hôte prestigieuse, c’en est presque gênant.
Il me présente à tout le monde, les institutrices des petits, les enseignants de l’école primaire, la cuisinière, les enfants…
Personne n’est oublié, et pour sûr, tout le monde saura qu’il y a une barang aujourd’hui dans l’école !!
Du haut de ses 30 printemps, Théa, c’est un vrai maître de cérémonie !
Les bâtiments sont neufs, les classes décorées comme je n'imaginais pas (pas
de souvenir que dans ma classe c'était aussi joli, mais mes souvenirs de maternelle datent un peu je l’avoue !).
La deco est très fournie, il est évident que notre passage n' y est absolument pour rien !
A travers la déco, les enfants se familiarisent avec l’alphabet, tels ces mots accrochés aux arbres fabriqués près des fenêtres de la classe, ou encore avec les traditions locales (à chaque jour de la semaine correspond une couleur pour les vêtements).
Je note cependant une différence entre les deux classes, la seconde est un peu moins équipée et l’institutrice n’a pas de bureau.
L’équipement, parlons-en justement !
Les étagères tiennent le coup, pas de problème, en revanche, elles sont désormais partagées entre la bibliothèque et les deux classes.
Thea me confirme que dans l’idéal, il en faudrait 4 de plus.
Les nattes de sol elles aussi sont solides, mais là encore, l'école accueille toujours plus d'enfants, il faudrait en fournir une dizaine supplémentaire.
Le matériel scolaire suit, je vais y revenir ensuite, Thea me dit juste qu'il manque de papier blanc A4 pour le dessin et de papier couleur pour le découpage.
Le grillage tient bon, il est installe dans une des deux classes et dans la bibliothèque, mais si je ne dis pas de bêtise, il manque encore dans la 2eme classe.
Les bouquins ne sont pas un problème, Charlie rencontre un franc succès, le 1er exemplaire est déjà scotché de partout !
Il était temps d’en ramener deux autres !
Il existe des petits bouquins photocopies qui fonctionnent sur le même principe (les gamins doivent retrouve des objets dans différentes scénettes), ça leur coûte 1$ pour 8 exemplaires
Bref, ça marche et les petits en redemandent !
Pour finir avec ce que l’asso a déjà mis en place à l’école, Thea a fait la demande de raccordement à l’électricité et effectué un versement mais ce n'est pas encore effectif, il me dit que ça devrait l'être pour fin juillet.
Je fais juste un petit aparté vite fait au sujet d'internet et de l'appareil photo, puisque je sais qu’il en a été question au sein de l’asso. Je ne juge pas ici de la pertinence de cet achat mais je veux quand même vous donner 2-3 éléments que je pense objectifs.
Envoyer des photos via le net ici est assez compliqué, les connexions ne sont pas très performantes.
Il faut :
1) être capable d'utiliser un petit logiciel pour réduire la taille des photos (or Thea n'est pas très a l'aise avec ce qui touche a l'informatique apparemment)
2) posséder une connexion ADSL ce qui n'existe d'après ce que j'ai pu moi même expérimenté que sur Phnom Penh et coûte cher. Thea m'a confié qu'il consultait internet depuis une ville plus proche de Phnom Penh mais que les connexions lui coûtaient chers (il paye 2500 riels pour 1 heure, sur Phnom Penh, c'est le même prix dans le meilleur des cas, voire plus cher)
Fin de l'aparté !
Mais venons-en aux enfants, car c’est aussi et surtout d’eux dont il est question !
Plus espiègles tu meurs, j'ai trouvé que la majorité d'entre eux était très curieuse de mon passage, pas sauvages pour 2 sous ces p'tits loulous !
L'appareil photo c'est un truc qui marche bien pour les faire marrer.
Voire plus, y'en a carrément un qui a trouve l'objet tout a fait a son goût. Un vrai clown le p'tit père !
J'ai donc tenté de lui montrer comment on s'en sert, il a fait sa 1ere photo (certes un peu floue, mais il faut bien débuter !!), JC je compte sur toi pour assurer la continuité des cours.
Ils sont trognons tous...
J'ai littéralement fondu pour un petit bonhomme qui m'a lancé de ces regards et de ces sourires... Vous voyez les yeux du chat botté dans Shrek ? Le même !
Que les parents de ce petit bonhomme fassent gaffe, je pourrais bien le kidnapper c'ui la !
Autant vous le dire de suite, nous ne sommes pas les seuls à nous investir dans la vie de l’école, PSE est là et ils sont plus que présents. Je parle de l'école dans son ensemble,
pas des classes de maternelle en particulier.
Perso, je trouve ça plutôt bien, toutes les sources de financement sont bonnes à prendre mais je crois qu'il faut essayer de discuter un peu de la finalité de leurs actions.
Ils ont fait pas mal de donations pour la cour, les bancs, quelques jeux aussi qui portent leur logo.
Et ils ont mis en place le passage d'un bibliobus qui passe tous les mercredis à l'école. J'étais donc la pour voir ce bus.
Du coup, les mômes ne manquent vraiment pas de livres, pas de souci de ce côté là.
Là où c'est moins clair pour moi, c'est qu'ils ont visiblement pris en charge une quarantaine d'enfants (lesquels ? sur quels critères ?) pour lesquels ils assurent un suivi médical (de quelle façon, la encore, pas compris).
Je n'ai pas insisté sur leur rôle mais je sais aussi que Thea a pendant un court laps de temps travaillé pour eux, je pense donc qu'il a tissé des liens avec cette ONG.
Théa me confiera d’ailleurs que c’est la pression de ses parents qui a fait qu’il s’est engagé dans la fonction publique, car il gagnait mieux sa vie en travaillant chez PSE. Mais je comprends mieux son engagement auprès des enfants aujourd’hui.
D’autres ONG (Krousar Youeung, coréenne il me semble, et une ONG japonaise) s'occupent aussi de leur fournir des bancs et des tables pour la bibliothèque ainsi que des bouquins.
Enfin, Thea me parle d'étudiants qui vont venir (via une ONG) de Hollande (?) pour donner des cours d'anglais et de Corée pour des cours de coréen (!). Je ne demande pas de précision, mais je pense bien évidemment que ça s'adresse aux plus grands !
Mais revenons-en aux petits et à ce qui m’intéresse aujourd’hui, la mise en place de soins pour les petits.
Commençons par l’hygiène.
Les enfants ont chacun un krama (en guise de serviette) et une brosse à dents.
Les instits les responsabilisent en leur demandant de faire sécher eux mêmes leur krama et de la ranger. Et forcement, ils en perdent régulièrement...
Là aussi, il y a besoin de réapprovisionnement, Théa me parle d’une quinzaine de kramas.
Les enfants disposent d’une fontaine à eau dans une des deux classes avec une timbale.
Je m’aperçois en les regardant l’utiliser que les enfants ne s’approprient pas leur timbale, ils prennent la 1ère qui leur tombe sous la main et la remette telle quelle sur la pile.
Peut faire mieux, peut être en leur installant de quoi ranger les timbales, chaque petit pourrait alors retrouver la sienne plus rapidement et facilement…
Le midi, les enfants prennent leur repas dehors, derrière les classes mais l’endroit est abrité. Les institutrices déplacent les nattes depuis les salles de classe pour que les petits ne mangent pas à même le béton.
Les enfants sont sollicités pour le service, et chacun d’eux apprend à nettoyer ses couverts et son bol à la fin du repas. Théa m’explique qu’ils font attention à équilibrer les repas comme ils le peuvent (alterner fruits et sucreries dans les desserts par exemple).
Théa me parle aussi du traitement des poux. Pour l’instant, c’est la bonne vieille méthode de la tondeuse.
Et comme il le souligne, si ce n’est pas un problème pour les garçons, ça l’est un peu plus pour les filles. L’investissement est minime, shampoing et peignes pour les lentes.
Et il me parait indispensable pour traiter aussi les nattes et les coussins sur lesquels les petits s’allongent pour la sieste.
Enfin pour finir sur l’hygiène, Théa me fait part d’un besoin d’une vingtaine de sous-vêtements. Les plus jeunes s’ « oublient » régulièrement, et les institutrices peinent à les changer avec le stock existant.
J’en arrive enfin au dernier volet de cette visite, le volet purement médical.
Thea a déjà une petite pharmacie assez rudimentaire que j'ai donc complétée. Ils utilisent énormément de paracétamol pour les petits, je pense qu'on peut déjà prévoir d'en racheter pour les prochaines visites.
Mais ce n'est pas tout ! Thea vermifugent les gamins tous les 3 mois. Beaucoup d'entre eux ont le ténia.
L'Etat donne de quoi faire ce traitement une fois dans l'année, il reste donc 3 autres fois a prendre en charge (la encore, comme je l'ai dit a Thea, je me fais votre rapporteur, mais j'ai bien précisé que c'est l'asso qui décidera en fonction de ses moyens de l'aide qu'elle peut ou souhaite apporter). Ils utilisent du Médazyl (molécule de mébendazole 500mg).
Ce que j'en pense, c'est qu'évidemment il faut soigner ces gamins mais il y a, à mon avis un énorme travail de prévention de santé à faire auprès des familles, c'est à mon sens le complément indispensable au traitement médicamenteux !
Ce traitement ne doit pas être perçu comme un traitement miracle par les parents, a terme il faut qu'ils prennent les mesures d'hygiène nécessaires, tout du moins celles qui sont dans leurs possibilités au quotidien.
On en vient aux maladies.
Il y a un dispensaire au village, avec 1 seul médecin.
La consultation est a 500 riels (et j'imagine fort que toutes les familles n'ont pas les moyens) mais il ne traître que les maladies bénignes.
Quand c'est plus lourd, ils n'ont pas d'autre choix que Phnom Penh, le
centre ville est je pense a 25km du village ce qui rend la ville inaccessible pour certaines familles.
Vous avez peut être entendu parler du Dr Richner, ce médecin suisse violoncelliste qui a monte un hôpital (je crois qu'il y a 4 antennes sur PP et une sur Siem Reap désormais) gratuit pour les enfants, le Kanta Bopha de mémoire...
Je sais aussi toute la controverse autour de ce médecin mais j'en glisse un mot a Thea.
Thea m'explique que la paperasserie de ces hôpitaux est un peu complexe pour les familles du village et qu'en plus, cet hôpital croule sous les demandes et bien évidemment, les cas les plus graves sont prioritaires.
Ce qui laisse peu de chance (mais la c'est moi qui extrapole) a un
enfant qui a la grippe ou une bronchite de se faire prendre en charge...
Je soumets à Thea l'idée de faire venir un médecin une fois par an pour un bilan pour chaque enfant.
Il est dubitatif. Pas sur la pertinence mais la faisabilité. Il ne voit pas comment réussir a faire venir un médecin de Phnom Penh.
Je vois d’autres pistes, l’hôpital Calmette (où se rendent les étrangers en cas de besoin), une infirmière… mais je ne sais pas si ces solutions sont véritablement exploitables.
Les petits s’apprêtent à faire la sieste.
Théa et moi nous éloignons des salles de classe pour ne pas les déranger.
La visite se termine par son bureau et les locaux informatiques.
Il en profite pour me montrer qu’il tient désormais à notre demande une comptabilité des rentrées/sorties d’argent de l’école.
C’est basique bien sûr, mais je sens bien que Théa a compris que nous souhaitions établir avec lui des relations transparentes. Et il se donne la peine.
Cette visite m’a beaucoup touchée à plein d’égards.
Difficile de ne pas ouvrir son cœur à tous ces gamins, timides, espiègles ou extravertis, leurs sourires font chaud au cœur.
Je sais désormais pour qui nous travaillons ici à 10000km d’eux.
Théa aussi m’a touché, il est fier du travail accompli, ces gamins (je pourrais presque écrire SES gamins), il les a dans le cœur.
Il les connaît tous, connaît leurs familles, leurs histoires…
Il a choisi les institutrices avec précaution, en s’assurant qu’elles sauraient leur transmettre le meilleur, quitte à faire l’impasse sur l’autorité !
Elles sont jeunes et c’est vrai que l’une d’elles a plus de mal à gérer les gamins mais Théa m’assure qu’elle est une bonne institutrice et qu’elle sait faire passer le savoir.
Et il s’est montré disponible à un point que je n’imaginais pas.
Je craignais d’arriver un peu comme un cheveu sur la soupe, de les déranger dans leur quotidien, et il n’en a rien été.
Je me suis sentie à l’aise, intégrée, Théa m’a même proposé de revenir sur la fin de mon séjour si je le désirais.
Ce ne sera pas faisable mais je garde à jamais les sourires de tous ces petits bouts dans un tiroir au fond du cœur.